Médecin du travail : qui est-ce, et à quoi sert-il ?
SOMMAIRE
- Combien sont-ils ? Où travaillent-ils ?
- Un peu d’Histoire :
- Quelles sont les missions du médecin du travail ?
- Focus sur la PDP
- Importance de la visite de « pré-reprise » dans le suivi de l’état de santé des travailleurs en lien avec ces actions de prévention secondaire et tertiaire.
- Mais au fait : comment devient-on médecin du travail ?
« Le travail c’est bien une maladie, puisqu’il y a une médecine du travail » (Coluche).
Cette affirmation humoristique est fort heureusement fausse. Cependant le travail peut rendre malade. En effet, de nombreux risques professionnels existent dans tous les métiers pouvant altérer la santé des travailleur(e)s. Comment aider l’employeur à supprimer ou réduire ces risques dans son entreprise et suivre l’état de santé des travailleurs ? Ce sont certaines des missions des médecins du travail.
Combien sont-ils ? Où travaillent-ils ?
Actuellement environ 4400 médecins du travail suivent plus de 18 millions de salarié(e)s du privé et plus de 5 millions d’agents des fonctions publiques (Etat, hospitalière ou territoriale). La majorité travaillent dans les 190 services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI ; association loi 1901) répartis sur le territoire pour les salariés du privé (et un peu des fonctions publiques). Les autres sont dans les 380 services de prévention et de santé au travail autonomes (SPSTA) intégrés à part entière dans des entreprises de plus de 500 salariés minimum, ou dans les services médicaux des fonctions publiques (anciennement dénommés « médecins de prévention »).
Un peu d’Histoire :
Insufflé par le ministre du travail et de la sécurité sociale Ambroise CROIZAT, la loi du 11 octobre 1946 a créé officiellement la médecine du travail qui a un rôle exclusivement de prévention.
Article L.4622-3 du code du travail en vigueur : « il consiste à éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant leurs conditions d’hygiène au travail, les risques de contagion et leur état de santé, ainsi que tout risque manifeste d’atteinte à la sécurité des tiers évoluant dans l’environnement immédiat de travail. ayant pour objectif d’éviter toute altération de la santé mentale et physique du travailleur ».
En 80 ans, l’environnement de travail a évolué, la médecin du travail aussi. Face au vieillissement de la population, à l’augmentation du nombre des maladies chroniques évolutives, de devoir travailler plus longtemps, à des conditions de travail et environnementales (pollution, réchauffement climatique…) plus dures, à l’augmentation des risques psychosociaux (RPS) et de leurs conséquences psychiques, la « médecine du travail » a évolué en 2004 vers la « santé au travail ».

Quelles sont les missions du médecin du travail ?
Depuis la loi du 2 août 2021 sur le renforcement de la prévention en santé au travail, La santé publique et la médecine du travail ont été décloisonnées. Cela permet de participer à des actions telles que les dépistages organisés, les vaccinations selon le calendrier vaccinal (en plus des vaccinations dans le cadre des « risques professionnelles » comme celles contre la leptospirose ou l’hépatite B…), des actions de prévention cardio-vasculaire (ECG, surpoids et obésité, impédancemétrie…).

Le médecin du travail assure les 5 missions suivantes (article R. 4623-1 du code du travail) :
- Suivre de l’état de santé (consultations en présentiel ou en téléconsultation) ;
- Faire des actions en entreprise (au moins 1/3 du temps) ;
- Conseiller l’employeur, le travailleur, les élus du personnels ;
- Assurer une traçabilité des données de santé des travailleurs, des risques professionnels dans le logiciel-métier et de faire de la veille sanitaire ;
- Participe pleinement à la prévention de la désinsertion professionnelle (PDP) des travailleurs.
Mais, impossible d’assurer seul toutes ces missions. C’est pourquoi, le médecin du travail coordonne une équipe pluridisciplinaire regroupant différents corps de métier (ex : infirmière en santé au travail, ergonome, psychologue du travail, secrétaire médicale, assistante sociale, ergonome, Assistant technique, intervenant en prévention des risques professionnels…).
Focus sur la PDP
La HAS a défini le maintien en emploi comme étant un « Processus d’accompagnement des personnes présentant un problème de santé avec un retentissement sur leurs capacités de travail, dans le but de les maintenir durablement en emploi (et pas seulement dans leur poste de travail, ni dans la seule entreprise d’origine) dans des conditions compatibles dans la durée avec leur santé ».
Ainsi, favoriser le maintien dans/en emploi des travailleurs ayant des soucis de santé [maladie(s) non professionnelle(s) et/ou d’origine professionnelle (AT/MP)] peut nécessité des actions de prévention secondaire par le médecin du travail (aménagement, restriction, transformation, adaptation du poste…) et tertiaire (PDP, maintien en emploi par reconversion, formation, inaptitude au poste…).
Ces actions de prévention secondaire et tertiaire repose sur une collaboration (sous réserve du consentement du travailleur concerné) entre le médecin du travail, ses confrères du soin et de l’assurance-maladie, aux assistantes sociales du service et/ou des CARSAT/CRAMIF et des partenaires du maintien en emploi (Cap emploi, Transitions-Pro, conseiller en évolution professionnelle (CEP), CARSAT/CRAMIF…).
Il est donc indispensable que les échanges et que la compréhension des attentes de chacun soient au rendez-vous, pour le bien du travailleur.


Importance de la visite de « pré-reprise » dans le suivi de l’état de santé des travailleurs en lien avec ces actions de prévention secondaire et tertiaire.
Dès qu’un arrêt-maladie dépasse 30 jours (quelle que soit l’origine : professionnelle ou non), le travailleur et/ou le médecin-traitant peut demander une visite dite de « pré-reprise » avec le médecin du travail (ou une infirmière en santé au travail).
La visite de pré reprise permet de faire le point sur la situation du travailleur et d’identifier ses capacités pour explorer les possibilités de retour à l’emploi (aménagements, restrictions temporaires ou définitives, transformation ou adaptation du poste, temps partiel thérapeutique et sa quotité, essai encadré, convention de rééducation professionnelle en entreprise (CRPE)…).
En conclusion, le métier du médecin du travail est riche, très varié et en pleine évolution. Il est un médecin de prévention (et non du soin, sauf urgence). Il a pour mission d’éviter l’altération de l’état de santé des travailleurs du fait de leur travail. Il est le seul à être à l’interface à la fois du travailleur, des médecins du soin et de l’assurance-maladie et de l’employeur.
Il requiert de nombreuses capacités telles que l’écoute du salarié, de savoir échanger avec un employeur, avec les partenaires sociaux, ses confrères du soin et de l’assurance-maladie, d’être observateur, d’avoir un esprit de synthèse… Tout cela dans les cadres réglementaires (pénal, civil, ordinal et disciplinaire).
Mais au fait : comment devient-on médecin du travail ?
Actuellement, il existe deux voies universitaires pour accéder à la spécialité « médecin du travail » :
- En fin de 6ème année de médecine : choisir le DES (Diplôme d’Etude Spécialisée) de « médecine et santé au travail » (durée = 4 années d’étude).
- Reconversion : Depuis 2013, tout Docteur en médecine (inscrit au Conseil de l’Ordre des Médecins et quelle que soit la spécialité) peut choisir de se qualifier en tant que médecin du travail. Il doit d’abord être recruté par un SPST, puis s’inscrire à un Diplôme Inter-Universitaire (DIU) de « pratiques médicales en santé travail pour la formation des collaborateurs médecins » (durée = 4 années d’étude). Il a alors le statut de « collaborateur-médecin » sous tutorat d’un médecin du travail qualifié. A l’issue des 4 ans (cours avec évaluations écrites, soutenance d’un mémoire de fin d’étude) et après avoir validé la formation universitaire, il demande sa qualification de médecin du travail auprès de la commission nationale de qualification.
Dans les zones où le nombre de médecins du travail est jugé insuffisant par l’Agence Régionale de Santé (ARS), les médecins de ville qui le souhaitent peuvent participer au suivi médical des travailleurs. Ils deviennent alors « médecin praticien correspondant » (MPC) après validation d’une formation théorique d’au moins 100 heures et un séjour d’observation en SPSTI de 3 jours. ils peuvent alors assurer le suivi médical de certains salariés dans le cadre d’un protocole de collaboration entre le MPC, le ou les médecins du travail et le directeur du SPSTI concerné.
Cette collaboration a cependant des limites :
- Le MPC ne peut ni proposer d’aménagement de poste de travail (ne connaissant pas les entreprises), ni prononcer d’inaptitude à un poste dans une entreprise (seul le médecin du travail est habilité à le faire) ;
- Le MPC ne peut pas cumuler cette fonction avec celle de “médecin traitant” pour les salariés suivis.

DATE DE PUBLICATION
24 juin 2025
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